Tribune d'Information sur le Rwanda

Au Secr�taire G�n�ral de l�ONU: Ne couvrez pas les assassins, publiez l�integralit� du rapport Mapping sur le g�nocide des Hutus au Congo

par Pasteur Buangi Makebo Puati.

Concerne�: Rapport du Projet Mapping concernant les violations les plus graves de droits de l�homme et du droit humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la R�publique D�mocratique du Congo

A Monsieur le Secr�taire G�n�ral des Nations Unies
Ban Ki-Moon
Si�ge des Nations Unies
10017 New York
USA

Lausanne, le 14 septembre 2010

Monsieur le Secr�taire G�n�ral,

Permettez-moi de vous adresser cette lettre ouverte � la veille de la publication officielle du Rapport du Projet Mapping concernant les violations les plus graves de droits de l�homme et du droit humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la R�publique D�mocratique du Congo. Le signataire de la pr�sente lettre que je suis n�est pas seul, des millions de Congolaises et de Congolais � travers le monde se reconnaissent dans ma d�marche.

La R�publique D�mocratique du Congo, mon pays, est entr�e dans ce pr�sent si�cle dans les larmes et le sang. Th��tre des pires crimes commis depuis la Seconde Guerre mondiale, la RD du Congo a non seulement �t� ignor�e par la communaut� internationale depuis plus d�une d�cennie, mais pire, elle a �t� victime d�un vaste complot dont les racines trouvent leur source dans la voracit� de grandes d�mocraties occidentales et leurs ramifications sous-traitantes et criminelles op�rant depuis Kigali, Kampala et Bujumbura.

Apr�s une longue dictature de plus de trente ans qui avait fini par an�mier l��conomie du Congo-Za�re, d�sorganiser les structures politiques et sociales, mis � bas la capacit� de d�fense de toute une nation, nous avions pens� � tort que les assisses de la Conf�rence Nationale Souveraine CNS) allaient enfin nous sortir du cauchemar du r�gime du Mar�chal Mobutu. Il n�en fut rien.

Les puissances ext�rieures qui nous tiennent dans les cha�nes depuis 5 si�cles et pr�tendent, � chaque carrefour de notre histoire, d�tenir les bonnes solutions pour notre peuple ont, en 1996, us� de leur prestige politique, de leur pouvoir financier et de leur puissance militaire pour armer des pays voisins dans une organisation h�t�roclite compos�e de l�Alliance des Forces D�mocratiques de Lib�ration (AFDL), de l�Arm�e Patriotique Rwandaise (APR) et les Forces Arm�es Burundaises (FAB) avec � sa t�te un faire-valoir Congolais, le nomm� Laurent-D�sir� Kabila. Assassin� tr�s rapidement en janvier 2001 parce qu�il ne voulait plus poursuivre la r�alisation du plan d�asservissement du peuple congolais et du pillage syst�matique de son pays par des puissances �trang�res, ��Joseph Kabila��, un homme incomp�tent, au pass� flou, � la biographie d�ficitaire a �t�, sans processus d�mocratique, plac� � la t�te du Congo. En 2006, soit cinq ans plus tard, � la suite d�un scrutin truqu�, organis� par l��tranger avec l�argent de l��tranger, M. ��Joseph Kabila�� fut adoub� et l�gitim�. Le seul m�rite de cet homme c�est de ne pas comprendre et ma�triser les grands enjeux internationaux pour mieux d�fendre les int�r�ts des Congolais et la place de la RD du Congo sur l��chiquier mondial.

La guerre d�clench�e en 1996 par la coalition AFDL/APR/FAB n�a v�ritablement jamais pris fin. La terreur exerc�e sur les populations r�fugi�es hutu et congolais autochtones a depuis longtemps d�pass� tout ce que j�ai pu voir d�atroce que l�homme puisse commettre. Nous, Congolaises et Congolais, avons longtemps cri� dans le d�sert. Personne ne nous entendait. Le gouvernement congolais a brill� par son incapacit� � s�curiser nos populations. Il a multipli� les signes de sa complicit� avec les pays agresseurs dont le Rwanda en int�grant les unit�s militaires rwandaises au sein de l�arm�e nationale. C�est ainsi qu�en janvier 2009, un criminel comme BOSCO NTAGANDA a rejoint l�arm�e congolaise en d�pit du mandat d�arr�t de la CPI lanc� contre lui en date du 22 ao�t 2006. De m�me, LAURENT NKUNDABATWARE, apr�s avoir longtemps s�vi et endeuill� plusieurs milliers de familles congolaises et hutu, a �t� mis � l�abri par le gouvernement rwandais, sans que son compagnon d�arme, le nomm� ��JOSEPH KABILA��, pr�sident de la RD du Congo n�exige son extradition pour qu�il soit jug� � Kinshasa. La Monusco, la mission de maintien de la paix la plus importante de toute l�histoire de l�ONU, d�p�ch�e sur le terrain, a montr� ses limites et ses failles. La derni�re preuve patente en date c�est le viol en une nuit de plus de 200 femmes et fillettes � LUVUNGI par des bandes arm�es � quelques kilom�tres d�une base des Casques Bleus.

Le Rapport du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l�Homme � para�tre en octobre prochain, et dont la fuite nous a fait conna�tre le contenu, montre l��tendue des crimes commis en RD du Congo de mars 1993 � juin 2003. L�implication de l�Arm�e Patriotique Rwandaise dans ces crimes est clairement d�montr�e. La chasse et l�abattage syst�matique des r�fugi�s hutu en territoire congolais par l�APR/AFDL sont eux aussi �tay�s par des t�moignages fiables. Nous savons aussi qu�en comptant plus largement, les r�fugi�s hutu de 1994 en RD du Congo n�ont jamais d�pass� les 2 millions. Or l�organisation Human Watch Rights fait �tat de plus de 5,4 millions de morts dans l�Est de la RDC depuis que le pr�sident Kagame avait lanc� ses troupes � l�int�rieur des fronti�res congolaises en 1996. Il devient donc clair que les hutu n��taient pas les seules victimes de la politique g�nocidaire du pr�sident Kagame. Les Congolais ont pay� et paient encore aujourd�hui le plus lourd tribut des atrocit�s de l�APR/AFDL au Kivu et de l�arm�e ougandaise et sa r�bellion, le LRA dans l�Ituri.

Monsieur le Secr�taire G�n�ral,

Permettez-moi d��voquer une question importante souvent oubli�e par la plupart des observateurs et analystes de la situation dramatique qui pr�vaut dans la r�gion des Grands Lacs africains. L�univers id�ologique du pr�sident Paul Kagame trouve sa substance fondamentale dans l�anthropologie du 19�me si�cle. Avant l�arriv�e au pouvoir d�Adolf Hitler en Allemagne, les th�ories qui ont engendr� le nazisme �taient d�j� appliqu�es aux populations colonis�es d�Afrique, d�Am�rique et d�Asie et ne choquaient personne en Occident. Au Rwanda, colonie allemande puis belge, ces th�ories raciales avaient persuad� les Tutsi, Nilotiques, qu�ils �taient sup�rieurs aux Hutu, Bantous. Par son nez aquilin, ses l�vres moins charnues, la finesse de son visage et la forme de sa t�te, le Tutsi �tait d�clar� plus proche de l�homme parfait, le Blanc, Europ�en et chr�tien et donc plus intelligent que le Hutu. Les Tutsi avaient fini par int�rioriser cet enseignement et ont m�pris� et inf�rioris� les Hutu. Le pr�sident Kagame croit encore � cette id�ologie, raison pour laquelle dans les attaques qu�il avait initi�es en 1990 depuis l�Ouganda contre son propre pays, il avait jug� que les Tutsi touch�s par les incursions de son arm�e ne m�ritaient pas d��tre plaints parce que appartenant � une ��race sup�rieure��, ils avaient accept� de rester au Rwanda en 1959 sous un pouvoir des ��ibicucu��, des gens inintelligents, des idiots et donc sans valeur, les Hutu.

D�s lors, s��claire d�un jour nouveau le passage ci-apr�s tir� du Rapport du Projet Mapping du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l�Homme sous le point 515�:

��On rel�ve �galement dans ces ��discours de sensibilisation�� tenus au Nord-Kivu une incitation � la population � chercher, tuer ou aider � tuer les r�fugi�s hutu rwandais qu�ils appelaient ��les cochons��. Cette terminologie aurait �t� d�utilisation g�n�rique pendant les op�rations dans cette r�gion��.

Cette essentialisation des populations bantoues est ressortie lors de la Deuxi�me guerre d�ao�t 1998-janvier 2001 en RDC. Dans les rangs de l�APR, les Congolais �taient appel�s ��des babouins��. En bestialisant ainsi les populations bantoues, ceux qui s��taient donn�s pour mission d�exterminer les Hutu et les Bantous du Congo s��taient du coup immunis�s contre tout sentiment de culpabilit� dans leur entreprise g�nocidaire. Selon eux, ils ne tuaient pas des �tres humains semblables � eux mais des b�tes, sinon des �tres inf�rieurs. La requalification � la baisse des crimes commis en RDC r�clam�e par le gouvernement de M. Kagame et l�impunit� qui pourra s�en suivre renforceraient et p�renniseraient davantage dans la r�gion cette id�ologie d�un autre �ge. Une telle perspective ne serait que plus explosive et compromettante dans la recherche d�une paix durable dans les Grands Lacs africains.

Le Rapport du Projet Mapping du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l�Homme a le m�rite de mettre en lumi�re, entre autres, que l�op�ration militaire AFDL/APR/FAB �tait une entreprise criminelle � plusieurs �tages. Le terme de ��g�nocide�� utilis� dans ce Rapport et qui provoque l�ire du pr�sident Kagame r�sulte du constat des crimes et de leur caract�re par l�Equipe du Mapping. Certes, un Tribunal devra se d�terminer dans la qualification de tous ces crimes, mais la suggestion de l�Equipe Mapping est un constat conclusif ob�issant � des crit�res d�finis par l�article 6 du Statut de Rome de la CPI qui stipule�: ��Aux fins du pr�sent Statut, on entend par crime de g�nocide l�un quelconque des actes ci-apr�s commis dans l�intention de d�truire, en tout ou partie, un groupe national, ethnique, racial, ou religieux, comme tel�: a) Meurtre des membres du groupe�; b) Atteinte grave � l�int�grit� physique ou mentale de membres du groupe�; c) Soumission intentionnelle du groupe � des conditions d�existence devant entra�ner sa destruction physique totale ou partielle�; d) Mesures visant � entraver les naissances au sein du groupe�; e) Transfert forc� d�enfants du groupe � un autre groupe��.

A la lecture du Rapport du Projet Mapping, on ne saurait s�emp�cher de voir des similitudes entre la d�finition du Statut de Rome de la CPI ci-dessus et un certain nombre des crimes d�crit dans le Rapport du Projet Mapping. Il n�appartient donc pas � l�ONU de c�der au chantage du pr�sident Kagame et d�op�rer des changements de terminologie pour satisfaire le gouvernement rwandais. L�ONU est-elle pr�te � assumer cette honte � la face du monde�? Rappelons que nous ne sommes pas dans le domaine de la cosm�tique ni dans celui de la chirurgie esth�tique. Il s�agit des vies humaines fauch�es par un pouvoir �tabli avec une volont� id�ologique d�extermination syst�matique et planifi�e d�une population cibl�e en fonction de son appartenance ethnique. Les peuples hutu et congolais ont droit � la justice et le pr�sident Kagame qui a toujours brandi le g�nocide tutsi doit comprendre qu�il n�est pas le seul capable de s��mouvoir devant l��puration ethnique dirig�e contre les siens. Le lifting �ventuel de ce Rapport signerait le discr�dit des Nations Unies aux yeux des Congolais, des d�fenseurs des droits humains dans le monde et des nations �prises de paix.

Les Congolais conscients du caract�re maffieux des rapports existant entre certains hauts dirigeants politiques et militaires de la RDC et le r�gime de M. Kagame n�attendent rien du gouvernement congolais, dont un grand nombre d�animateurs sont issus des groupes arm�s tels que l�AFDL, le RCD ou le CNDP et susceptibles de poursuites judiciaires selon le Rapport du Projet Mapping. Malgr� des d�clarations ant�rieures telles que celle faite par M. ��Joseph Kabila�� dans son discours prononc� devant l�Assembl�e g�n�rale de l�ONU lors de sa cinquante-huiti�me session, � la 10e s�ance pl�ni�re, disant�: ��la RDC croit � l��tablissement d�un Tribunal p�nal international pour la RDC pour faire face aux crimes de g�nocide, crimes contre l�humanit�, y compris le viol utilis� comme instrument de guerre et les violations massives des droits de l�homme��, les Congolais dans leur ensemble savent qu�il n�y a aucune volont� politique dans le chef du gouvernement de la RDC pour la cr�ation d�une telle juridiction. Si, comme il le dit, la RDC, c�est-�-dire les Congolaises et les Congolais, y croit, le pr�sident actuel de la RDC n�y croit pas et n�a aucun moyen d�y croire. Faut-il le rappeler�? M. ��Joseph Kabila�� a servi dans l�AFDL et a �t� entre autres � la t�te des troupes qui ont commis des massacres � Kisangani. Comment voulez-vous que dans ces conditions le pr�sident de la RDC impulse son gouvernement pour que justice soit rendue � celles et ceux-l� m�mes qu�il a contribu� � massacrer�?

Complices dans le crime avec l�APR de M. Kagame, le chef de l�ex�cutif de la RDC entra�nera son gouvernement � r�cuser le Rapport qui reconna�t enfin et exhume aux yeux du monde les crimes commis contre les Congolaises et les Congolais. Souffrez donc, Monsieur le Secr�taire G�n�ral, que je vous dise que la voix du gouvernement congolais allant dans le sens d�une retouche voire d�un rejet du Rapport du Projet Mapping ne refl�te pas la volont� du peuple congolais et n�engage en rien ce dernier. N�est-il pas surprenant et incompr�hensible que les autorit�s d�un pays lac�r� et humili� de toute part par des arm�es �trang�res se livrent � une critique en r�gle d�un Rapport qui ouvre enfin la voie de la justice et de la reconnaissance pour leurs propres populations�? Non, les repr�sentants du FPR grim�s en Congolais et les courtisans congolais plac�s � la t�te de notre pays ne peuvent pas crier la soif de justice qui nous habite nous Congolaises et Congolais. Ils sont incapables de relayer et de donner une r�sonance exacte de la col�re et de la rage contenues dans nos c�urs. Ils ne sont pas � m�me de traduire dans les faits la volont� du peuple congolais de laver l�affront et l�humiliation qui lui sont faits depuis 15 ans�! La pr�occupation actuelle du gouvernement de M. ��Joseph Kabila�� est la m�me que celle de ses comp�res de crime � Kigali�; sauver sa peau et de ce fait son pouvoir, la justice en faveur du peuple congolais �tant le cadet de ses soucis.

Monsieur le Secr�taire G�n�ral, voici ce que le peuple congolais attend de l�ONU et qu�il crie du fin fond de nos campagnes de Beni-Lubero, de Luberizi, de Luvungi, de Kiwanja, de Bunia, de l�Ituri� et que je vous transmets par �crit en lettres majuscules�:

RENDEZ ENFIN JUSTICE AU PEUPLE CONGOLAIS ET A TOUTES LES VICTIMES EXTERMIN�ES EN R.D.C. QUE TOUS LES COMMANDITAIRES ET SOUS-TRAITANTS PHYSIQUES ET MORAUX, OCCIDENTAUX, AFRICAINS ET AUTRES, DE L�ENTREPRISE CRIMINELLE PERP�TR�E EN RDC SOIENT JUG�S. LA REQUALIFICATION � LA BAISSE DE CES CRIMES CONSTITUE EN ELLE-M�ME

UN CRIME, UN M�PRIS POUR LES VICTIMES ET LEURS FAMILLES ET UNE HUMILIATION POUR LE PEUPLE CONGOLAIS.

C�est la seule et unique voie pouvant nous conduire � la paix et � la r�conciliation dans la r�gion des Grands Lacs africains qui saigne depuis trop longtemps.

Selon l�orientation que vous prendrez, Monsieur le Secr�taire G�n�ral, l�histoire vous jugera, les Congolaises et les Congolais ainsi que le monde entier prendront acte des suites que vous donnerez aux souffrances de notre peuple. Car, pour nous, aucun int�r�t ni aucune autre consid�ration ne doit bafouer le droit � la justice de tant de vies d�hommes et de femmes supprim�es en R�publique D�mocratique du Congo par la soif de pouvoir absolu et de supr�matie ethnique et id�ologique d�une poign�e d�hommes.

Veuillez agr�er, Monsieur le Secr�taire G�n�ral, mes salutations distingu�es.

Tr�s haute consid�ration.
Pasteur Buangi Makebo Puati.


septembre 29, 2010   1 Comment